Almanach du Tastevin
Réalisé par le Collectif des Editions d’En Bas – Jean Richard, Antonin Gagné & Pascal Cottin et avec l’aide précieuse de Albert Jaggi. Claire-Andrée Gagné, Laure Richard et Monique Calinon

Monique Misiego | Difficile pour moi de vous parler de cet almanach. Vraiment ça m’a posé problème. Par quoi commencer, que mettre en lumière? Puis j’ai décidé de vous en livrer la préface: L’almanach ou comment bien se conduire sans jamais prendre le volant/Eric Poindron. Un dicton qui n’existe pas dit à peu près ceci «les fêtes font l’homme et les bonnes fêtes font le bonhomme». Il s’avère que l’almanach, le livre le plus ancien après la bible, est une fête. Un second dicton, qu’il faudrait inventer, dit à peu près cela: Bon saint Vincent savant sent son bon vin – Cent et cent bons vins font son saint Vincent – Bon sang, sans vin, Saint Vincent s’en va – Saint Vincent c’est vain – Il s’avère encore que ledit Saint Vincent est le saint patron des vignerons. Naguère, quand l’existence n’était que religion, les populations de Suisse ou de Navarre savaient remercier les saints et rire de leur sainteté. On invoquait aussi les dieux et les cieux puis on les célébrait quand ceux-ci faisaient preuve de miséricorde. Puis vin(T) l’almanach. Ledit almanach comprenait souvent le calendrier annuel, les impératifs agraires, les fêtes mobiles, les éclipses, les saisons, quelques prédictions, la météorologie, l’influence des astres sur les plantes, les dates des foires et des marchés ou le cours du soleil et de la lune. Puis vinrent les almanachs: sérieux ou grotesques, comme une année à venir. L’Almanach du bon laboureur, des bergers, des chasseurs, des chasseurs de papillons, des chasseurs de toutes espèces, des farceurs, du Messager boiteux, des contribuables et des électeurs, des farceurs et des comiques, du riche et du pauvre, du zouave guérisseur ou joyeux de la Champagne – édité jadis par votre serviteur. Mais cette année, faisons fi de ces almanachs, car nous ne boirons pas de ses eaux ni ne mangerons de ces pains-là. Car vin(t) enfin l’Almanach du tastevin. Et ses réjouissances bachiques à toutes les pages. A l’image de cette prédiction de Ramon Gomez de la Serna, l’espagnol, qui prit grand et malin plaisir à visiter la Suisse et ses vins. «Il y a eu au commencement de chaque repas, deux sortes de regards furtifs: celui qu’on lance vers le décolleté de la belle madame, celui que l’on lance vers l’étiquette de la bonne bouteille.» Oui, l’Almanach du tastevin est un repas: un pain quotidien. Et il me revint ce bon mot d’un poète ami qui disait à peu près ceci «je bois du vin à table, même s’il n’y a pas de table», aussi faisons un vœu et faisons ainsi, lisons chaque jour l’Almanach du tastevin à table, même s’il n’y a pas de table. Qu’entends-je, chantant une chanson à boire: que vois-je à l’horizon? le colporteur, l’homme de joie et de raison et presque de médecine qui apporte le bel ouvrage et dit: «Chaque ordonnance est un joyeux récit, on souffre moins dès l’instant que l’on rit. Je vous apporte un remède aux migraines» Voilà, il est venu le temps de bien se conduire; l’argent est tiré et il faut le boire – Avec ou sans religion, mais religieusement – Servons le vin des coteaux ou d’honneur – Et sans clopiner – Chopinons à l’unisson – Amen, et surtout santé! Vous admettrez que ma chronique eut été bien fade à côté de cette prose. Je dédie cette chronique à nos amis vignerons qui ont bien besoin de soutien. Buvez avec modération, mais surtout buvez suisse.