Ariane, un beau sourire lumineux
Gil. Colliard | De fil en aiguille, les années ont passé sans qu’on y prenne garde. Accrochée dès fin 1991, «Ariane Couture» est une enseigne qui, dès lors, a fait partie du paysage d’Oron-la-Ville. Dans l’angle du chemin de la Poya, le panier et le présentoir aux bonnes affaires disparaîtront définitivement le 3 juin prochain.
Une vie cousue de points multicolores
Dans la boutique, habituellement bondée de vêtements chics et classiques, de sous-vêtements et d’accessoires de qualité, de nombreux espaces vides accusent la fin. «C’est avec beaucoup de regrets, mais la fatigue et les années ainsi que la fin du bail qu’il aurait fallu renouveler m’ont permis de prendre cette décision» témoigne Ariane Burgdorfer. Elle m’accueille dans son arrière-boutique, garnie de bobines de fils multicolores, de boutons et où la machine à coudre est prête à faire quelques points.
Née le 5 février 1945 dans cette maison qui abritait un commerce de modiste, la petite fille qu’elle était alors avait déclaré, du haut de ses 6 ans: «Un jour, je reprendrai ce magasin!» Promesse qu’elle a tenue, puisqu’en 1991 elle recevait les clés de Mme Pittet qui remettait la fameuse boutique. Active et créative, la jeune couturière, qui avait fait ses 3 ans d’apprentissage à Lausanne, n’en était pas à ses débuts. Avec son goût pour le travail bien fait et ses doigts d’or, elle a assuré la création des costumes de la Revue de Barnabé de 1965 à 1995, où elle adorait faire les chapeaux. Par ailleurs, les acteurs de la Revue de Thierrens sont toujours habillés par elle. Dans un classeur on découvre quelques photos de ses plus belles robes de mariée, plus d’une cinquantaine réalisées. «Avant le magasin, j’ai habillé mes clientes de A à Z, après cela fut plus difficile» se souvient-elle. En fin 2001, la petite épicerie attenante à la boutique fermait ses portes. Ariane Burgdorfer en profita pour s’agrandir et le 1er mai 2002 inaugura sa nouvelle surface maintenant doublée.
Prenant une part active dans la société, elle a également été pendant 15 ans, présidente des Couturières vaudoises; durant 13 ans, présidente des Commerçants d’Oron, et de 50 à 65 ans, experte à l’Ecole de couture. Sportive aussi, elle qui fut professeure de ski aux Paccots, a pratiqué ce sport jusqu’à l’hiver dernier et n’a fait qu’une seule sortie cette année, les genoux accusant la fatigue. Elle a aussi pris le temps de vivre sa vie de femme et de voir grandir ses deux enfants qui lui ont donné quatre petits-enfants. Un seul regret toutefois dans cette vie passionnante qui l’a comblée: ne pas avoir fait son permis poids lourds!
La toile étrangle le prêt-à-porter
Grâce à son choix d’articles de qualité, au conseil professionnel et aux retouches gratuites pour tout vêtement acheté, la commerçante a su fidéliser une clientèle et créer de nombreuses et chaleureuses amitiés. «Je n’ai pas eu à souffrir de l’arrivée des grandes enseignes à Oron-la-Ville; elles ne proposent pas le même service, cependant le franc fort et la concurrence de la vente par Internet posent actuellement de réels problèmes», explique-t-elle.
Un fil qui se coupe mais pas un ouvrage qui se termine
Si le 3 juin marque la fermeture de la boutique «Ariane Couture», cela ne signifie pas la fin de toute activité. Notre couturière s’activera dans son atelier, chez elle, à Gillarens. «Mes machines n’auront pas le temps de rouiller» promet-elle avec son beau sourire lumineux. Aujourd’hui, elle remercie sa fidèle clientèle qui a rempli son livre d’or de témoignages émouvants, et particulièrement sa chère vendeuse Colette qui a été son précieux soutien depuis 6 ans. A l’occasion du dernier jour, en ce vendredi 3 juin, un apéritif sera offert de 16h à 18h.