Chexbres – Pierre Jaccottet, une vie conjuguée au passé simple
«J’ai eu une vie qui valait la peine d’être vécue!»

Pierre Dominique Scheder, chronicœur de Chexbres | Pierre Jaccottet a fêté ses 90 ans le 2 octobre 2021 à Chexbres. Il me reçoit dans sa magnifique demeure de Monteiller, acquise en 1967, où l’on peut admirer un tableau de la femme de Philippe Jaccottet, son célèbre cousin poète. L’image représente une porte-fenêtre donnant sur le jardin de Grignan qui a tant inspiré l’auteur. Pierre me résume comme en une belle récitation les étapes de sa vie. Simple comme bonjour : né à Lausanne le 2 octobre 1931; études secondaires grec et latin au collège de la Cité. Ensuite, virage: il étudie la biologie dont deux ans à Vienne. Sa fiancée Christiane, claveciniste virtuose connue dans le monde entier, l’accompagne. A leur retour à Saint-Saphorin en 1957, ils se marient. Pierre, nommé dans un premier temps professeur au collège de jeunes filles à Villamont, finit par retrouver ses enseignants devenus collègues au gymnase de la Cité. Il y entreprend notamment en compagnie de son ancien maître de latin-grec un voyage d’études en Sicile avec leur classe commune. Et comme tout est histoire de famille, le fils du couple, Marc, né en 1961, enseigne à son tour en tant que professeur d’allemand au gymnase de Burier. Quant à Pierre, il se trouve un violon d’ingres: facteur de clavecins. La maison est encore remplie de la présence d’une vingtaine de sublimes instruments qu’il a façonnés de ses mains de génial artisan. L’un d’eux est la copie d’un clavecin de la région d’Anvers, sur le devant duquel est inscrit: Omnis spiritus laudet dominum (Que tout esprit loue le seigneur). Un plus petit modèle offre ses touches nacrées telles les dents dans un joli sourire. Je n’y résiste pas et je pianote quelques notes de ma chanson Notre-Dame de Lavaux « Riez pour nous ! ». Ainsi monte en nous une louange pour la vie de Pierre tout en finesse, noblesse et… poésie ! « J’ai eu une vie qui valait la peine d’être vécue ! » Oui ! Votre itinéraire est bien une sorte de poème vivant écrit dans les trames d’une existence conjuguée joyeusement au passé simple. Car « il est si simple d’aimer ! »