Cinéma – Sans filtre, de Ruben Östlund
Au cinéma d’Oron, les 7, 9 et 11 octobre

La palme d’or 2022 du Festival de Cannes est sortie cette semaine au cinéma d’Oron. Il s’agit du sixième long-métrage du réalisateur suédois Ruben Östlund, connu pour sa présence à Cannes en 2014 avec Snow Therapy, et en 2017 avec The Square, pour lequel il avait déjà remporté une palme d’or.
Victime de la mode
Carl et Yaya sont tous deux mannequins et sortent ensemble, vraisemblablement pour augmenter leur nombre de followers instagram. Au début du long-métrage, l’accent est mis sur lui, et sur ses difficultés à trouver sa place dans le monde de la mode connu pour sa rudesse. Spectateur de ses exploits à elle, il est ainsi d’abord présenté comme une victime. Victime de son âge, puisqu’on lui fait remarquer à quel point son visage a vieilli, victime de la hiérarchie de la fashion week, qui le place au dernier rang d’un défilé de mode dans lequel sa copine rayonne, victime finalement des caprices et des manipulations de sa copine qui le force à se faire inviter au restaurant à coups de « merci mon chat ». Difficile ainsi d’envisager aux premières minutes du film les diverses renversements qui vont s’opérer ensuite.
Oppresseur sur grand navire
L’oppression qu’on lui voit dans ces premiers instants est en effet bien vite contrebalancée par sa présence sur un yacht de croisière, offert à Yaya par son statut d’influenceuse. Fier et capricieux, comme lorsqu’il fait licencier un employé du navire qui plait un peu trop à Yaya à son goût, notre jeune visage tourmenté par la mode se transforme en oppresseur avéré. Ce premier mouvement de renversement, qui passe discrètement sous le regard du public, en annonce en fait un plus global qui sera le sujet de ce film étiré en trois grandes parties. Cette nouvelle inversion des rôles, qui prend place au milieu du film, sera quant à elle majestueusement amenée par une longue séquence d’orage sur le bateau, menant tous les vacanciers privilégiés au plus profond de leurs tripes.
En haleine
Parce que ce long-métrage nous fait traverser une série d’aventures fondamentalement contrastées avec des protagonistes qui changent avec elles de nature et de statut, le long-métrage entraîne son public sans qu’il s’en aperçoive durant les presque trois heures que dure le film. Tout en conservant une certaine lenteur au sein de quelques séquences, il parvient à rythmer une histoire vertigineuse en rebondissements, combinant des sous schémas narratifs à une grande trame globale. Sans filtre nourrit ainsi son public en soif de fiction et d’images léchées, avec une histoire de renversement des rapports de domination finalement assez simple.
« Sans filtre » au cinéma d’Oron
Le 7 octobre à 20h, le 9 octobre à 18h et le 11 octobre à 20h

