Fête des Vignerons-D’histoires et de l’Histoire de cette grande Fête
La chronique de Bacchus
Bacchus | Comme Silène, Cérès ou Palès, je ne serai pas de la prochaine Fête. Orphée et d’autres y ont fait une apparition. Moi j’étais de toutes, cité ou représenté, parfois avec excès, mais toujours fidèle et généreux. On m’a associé à toutes sortes de dépravations. Je suis pourtant l’ami du vin et des vignerons, consommant sans excès et avec bonheur. Le vin ne m’a pas rendu indiscret et n’a pas délié en vain ma langue. Les temps ont changé. On veut de la lumière, du spectacle, de l’action. Pour la petite histoire, ou la grande avec une majuscule, je suis né dans la Grèce antique sous le nom de Dyonisos. Zeus fut mon père. Les muses et Silène m’ont élevé. J’ai introduit la vigne en Egypte et, le premier, ai fondé une école de musique. J’étais à l’honneur en 1865 et 1889. On m’a loué tout au long des dernières Fêtes. «Je ne m’inscris pas pour autant dans une tradition» aurait dit le metteur en scène Daniele Finzi Pasca qui a écarté toute divinité et même, ô sacrilège, un soliste au Ranz des vaches. Il a pourtant échoué avec le messager boîteux. Peut-être une concession à la Confrérie, mais le messager n’est pas divin, tout comme la Vaudoise qui intégrait alors le spectacle en creusant son sillon sur les eaux paisibles du lac, comme nos montagnes et celles d’en face. «En 2019, le spectacle sera dans la scène, et uniquement dans la scène.» Serait-ce que le dieu vivant, c’est lui? Nous reparlerons d’histoire et de l’histoire de cette grande Fête tant évoquée dans les caveaux et entre amis. Pour le moment, place aux figurants, les nouveaux et ceux qui rempilent. Certains se rappellent les précédentes. «Alors on recevait un courrier, et avec un stabilo on marquait les dates qui nous concernaient.» L’informatique a tout rendu plus compliqué. Certains candidats sont abonnés à des sites gratuits dont la capacité est limitée et ne reçoivent pas les informations. D’autres changent d’adresses comme de chemises, effacent leur traçabilité. Les ménages sont devenus incertains. On parlait en 77 de la Fête des mariages, en 99 de celle des divorces. Pour une grande partie des futurs figurants, une première audition a eu lieu samedi 13 janvier à Puidoux dans la nouvelle salle de sport baptisée Forestay. En musique, par groupe de cent, entraînés par des danseuses, les candidats devaient accomplir des pas, imprimer des mouvements dans l’air, certains avec bonheur, d’autres avec peine, mais toujours accompagnés de la souriante bienveillance des responsables. Chacun aurait sa place, sa joie, celle de participer à ce grand événement. Puis il a fallu se rendre dans la zone industrielle de St-Légier où une équipe motivée prenait les noms, les mesures, des photos. C’est dire aussi qu’en amont le travail a commencé bien avant le recrutement des acteurs-figurants. Promesse était faite d’une réponse à fin février. En mars déjà, certains se sont impatientés, d’autres n’y croyaient plus. Des rêves s’effondraient. On se soutenait mutuellement. Un alerte octogénaire évoquait 1955, le directeur artistique Maurice Lehmann arrivant de Paris en gare de Vevey. Devant l’Alpha, aujourd’hui l’Astra, il disait d’un ton sans réplique: «Toi, tu seras, faune, et toi…». Il fut l’un des18 faunes et s’en rappelait comme s’il évoquait un souvenir d’hier. Le 28 mars, lors de l’assemblée des délégués de la Fédération patronale vaudoise à la salle del Castillo à Vevey, François Margot, abbé-président de la Confrérie des Vignerons de Vevey a brillamment expliqué le déroulement de la prochaine Fête, calquée sur le vigneron, son travail, à l’intérieur même d’une scène centrée sur le spectacle. «2019 est une date impérative, rappelait l’abbé-président. Il n’y aura pas 2020 comme il y a eu en son temps 2001 suivi de 2002, pour une autre fête.
Mi-avril, rien
Les troupes ne sont pas constituées. Elles ignorent leur costume. Il leur est impossible de partir à la recherche d’un caveau, cet élément essentiel de la Fête, des retrouvailles, des rendez-vous, des moments de folie ou de tranquillité entre membres d’une même troupe…Et puis les réponses se sont mises à arriver, au compte-gouttes, la plupart fin avril sous forme de confirmation de rôle accompagnée d’une charte. L’acompte validerait l’inscription. Mais que d’incertitudes enfin balayées! J’entends parfois dire, au fond des caves humides et secrètes: «A-t-on réussi sa vie parce qu’on a fait trois Fêtes?» D’aucuns l’ont prétendu. Disons alors que j’ai presque raté la mienne.

Silène en 1999 dans les rues de Vevey

Prise de mesures pour les costumes