La Fondation Gianadda expose l’oeuvre de Pierre Soulages
Une œuvre austère et exigeante
Pierre Jeanneret | Proposer Pierre Soulages pour la grande exposition d’été de la Fondation constitue un acte de courage. Car si cet artiste presque centenaire (il est né en 1919) est internationalement célèbre, son oeuvre, où le noir a pratiquement éclipsé toutes les autres couleurs, peut être qualifiée d’austère et d’exigeante. Du noir partout oui, dans une oeuvre par ailleurs résolument non figurative, mais ce noir revêt des formes, des luminosités et des épaisseurs très diverses. Soulages a toujours été un chercheur au niveau des matériaux. Il a longtemps utilisé le brou de noix, puis il a, le premier, donné ses lettres de noblesse au goudron. Il travaille sur différents supports: papier brun ou blanc, verre, toile, bois… On note malgré tout quelques intrusions d’autres couleurs dans ses toiles: des taches brunes, blanches ou rouges, qui ne font qu’accentuer, par contraste, la primauté du noir. Quant aux formes – souvent des bandes horizontales droites ou ondulantes – l’artiste les a travaillées à l’aide de très larges brosses. Il joue aussi sur les épaisseurs, créatrices de reflets, si bien qu’on peut parler, à propos de certaines toiles, d’un noir «lumineux», même si c’est un oxymore. Le visiteur découvrira aussi le travail du peintre à travers les photographies réalisées sur lui par Vincent Cuillère. Et pour sortir un peu du noir, on changera d’atmosphère dans la salle consacrée à vingt-six peintures du collectionneur de Winterthour Bruno Stefanini, déposées pour dix ans à la Fondation. On y remarquera surtout d’admirables toiles de Hodler et Vallotton. Enfin, on ne saurait visiter une exposition chez Gianadda sans faire le tour du beau jardin arboré, avec son rare ensemble de sculptures figuratives ou abstraites. C’est à chaque fois un enchantement!
«Soulages. Une rétrospective», Fondation Pierre Gianadda, Martigny, jusqu’au 25 novembre.

Pierre Soulages dans son atelier