La petite histoire des mots
Vert

Georges Pop | Le mot « vert » a submergé les médias suisses lors des élections fédérales du 20 octobre dernier pour reconnaître ou saluer la vague écologiste amplifiée par les préoccupations grandissantes liées aux bouleversements du climat et à la dégradation de l’environnement. De nos jours et sous nos latitudes, le vert est devenu l’emblème translinguistique du mouvement et des partis environnementalistes. La pensée « verte » fut notamment initiée par le « Green Party » britannique dès 1973, suivi par les « Grünen » allemands en 1980 puis par les « Verts » français deux ans plus tard, etc. Mais avant cela, cette jolie couleur liée à la nature, à la végétation, à la chlorophylle, au printemps et à la jeunesse, fut aussi adoptée emblématiquement, notamment, par les indépendantistes irlandais et surtout, beaucoup plus tôt, par l’Islam en référence aux étendards du Prophète. C’est pourquoi le vert est dominant sur nombre de drapeaux de pays majoritairement musulmans, à commencer par celui de l’Arabie saoudite. Jadis la couleur verte fut aussi associée au diable et à toute une panoplie d’être surnaturels comme les fées, les lutins ou même les sorcières et, plus récemment, aux extra-terrestres (les fameux petits hommes verts). Certains expliquent ce lien au fantasmagorique du fait que le vert est une couleur très instable, un mélange de jaune et de bleu, qu’il était autrefois difficile d’obtenir. Le mot « vert » nous vient tout simplement du latin « viridis » qui désignait certes la couleur mais voulait aussi dire verdoyant et, en sens figuré, fort et vigoureux. En ancien français le terme fit son apparition dès le Moyen-Âge sous sa forme actuelle ou avec un « d » à la place du « t » (verd). La force et la vigueur associées à cette couleur nous a valu, entre-autres exemples, le terme de « vert-galant » qui désigne un homme entreprenant malgré son âge. Le populaire roi de France Henri IV portait d’ailleurs lors de son règne le sobriquet de « vert-galant » tant son irrépressible penchant pour le beau sexe était connu de tous. Certains historiens supposent même que Ravaillac, l’assassin du souverain, fut mandaté par une femme jalouse. Mais cela reste à prouver ! La couleur verte est aussi associée à toute une série d’expression : « être vert de rage », signifie être très violemment en colère ; « avoir la main verte » veut dire être doué pour le jardinage ; « en voir des vertes et des pas mûres » fait savoir qu’on a vu des choses choquantes ou scandaleuses. Quant à l’expression « donner le feu vert » qui exprime une autorisation, elle puise ses origines dans la langue anglaise et nous vient de la traduction intégrale de « to give the green light ». Elle remonte au 20e siècle avec l’introduction des feux de circulation qui adoptèrent le vert pour symboliser la liberté de passer, le rouge figurant l’interdiction. Selon un sondage réalisé en Europe, une personne sur six déclare que le vert est sa couleur préférée. Il est vrai que selon certaines études parfaitement sérieuses, le vert a des vertus apaisantes pour ceux qui en sont entourés. Après tout, n’est-il pas plus apaisant de vivre à la campagne qu’en plein centre-ville ?