Sauver Lavaux III sauve-t-il vraiment Lavaux ?
par Antonio Costa | Les constructions sous terre mettent en péril l’avenir de Lavaux
Les nouvelles restrictions au niveau des constructions et des zones constructibles prévues dans l’initiative ne sont pas favorables pour tout le monde.
Nous nous sommes rendus à Treytorrens, petit hameau de la commune de Puidoux, qui compte un peu plus de 50 habitants. Treytorrens abrite quatre caves connues dont le domaine Bovard.
Le domaine Bovard est tenu par Antoine Bovard et son fils Denis, qui vient de reprendre le domaine familial. Vignerons depuis onze générations dont deux ans à Treytorrens, la famille possède sur les lieux sept hectares dont deux dédiés uniquement à la récolte, la mise en bouteille et la commercialisation de leur vin sur place. Avec une cave trop petite, Denis Bovard, jeune vigneron de 28 ans, a besoin de continuer à produire, de continuer à évoluer et de pérenniser le domaine qui lui a été transmis et qu’il désire transmettre aussi à ses enfants dans l’avenir.
Il désire construire à Treytorrens une nouvelle construction entre deux bâtisses existantes. Cette maison serait constituée d’un sous-sol pour une cave viticole, d’un étage à moitié enterré pour une deuxième cave et d’un deuxième étage pour des chambres destinées à accueillir les travailleurs de la vigne aux périodes de pointe comme l’effeuillage et les vendanges. Une construction bien pensée, qui n’enlaidirait pas Lavaux, mais le rendrait plus beau en remplaçant un trou existant recouvert d’une bâche par un beau bâtiment d’exploitation vitivinicole. Parfaitement autorisée et légale aujourd’hui, cette construction ne pourrait tout simplement pas se faire au cas où l’initiative venait à passer.
Que resterait-il à Denis Bovard, comme à tant d’autres vignerons, comme solution pour continuer à produire et vivre de leurs cultures si le vent tourne le 18 mai ? Constructions sous terre, délocalisation de la production dans des zones industrielles… Nous sommes allés à la rencontre des banques afin de donner leur avis sur le futur de Lavaux et de ses indépendants.
Pas de traitement de faveur pour les vignerons
L’initiative ne prévoit pas de traitement de faveur pour les vignerons. Tout comme les banques. Une banque loge tout le monde à la même enseigne lorsqu’il s’agit d’accorder un crédit. Du moment qu’il y a un permis de construire, deux éléments sont importants pour l’octroi d’un crédit auprès d’une banque: des fonds propres et la rentabilité financière de l’entreprise. Un projet de construction sous terre coûte beaucoup plus que n’importe quel autre projet de construction. Ce qui demande un apport de fonds propres beaucoup plus élevé que les vignerons n’ont peut-être pas ou n’auront pas sur le moment et qui pourrait les mettre en péril. La banque a quant à elle toujours une vision de l’historique et proactive de l’entreprise. Elle vérifie le passé financier et projette la rentabilité de l’exploitation du vigneron sur les années à venir. Sa capacité financière doit donc être suffisante pour assurer le coût. Savoir si l’investissement mis en place offre un retour et une rentabilité. Les années de remboursement de crédit ne seront pas elles non plus rallongées. Le coût mensuel et annuel sera beaucoup plus élevé et ne s’étendra donc pas.
Que restera-t-il comme solution aux vignerons ? Augmenter le prix de leurs vins les rendant inaccessibles pour pouvoir continuer à survivre ou délocaliser leurs productions dans des zones industrielles qui se situent à mille lieues de Lavaux ?…