Technologie mobile
La 5G incontournable ?
Thomas Cramatte | Alors que des constellations de satellites sont envoyées en orbite pour développer l’accès à internet, le déploiement de la 5G, via l’installation d’antennes adaptatives, est toujours freiné par un nombre important d’oppositions.Mais alors pourquoi cette technologie qui suscite intérêt, espoir, inquiétude ou même rejet pour certains, est-elle cruciale pour notre futur ?

Projets-pilotes, principe de précaution, opposants, voilà les obstacles auxquels les défenseurs de la 5G font face quotidiennement. Si le déploiement de cette technologie a rencontré de nombreuses difficultés depuis ses débuts, le National a donné un coup d’accélérateur cet été. Approuvée par 97 voix contre 76, une motion en faveur de la cinquième génération de téléphonie mobile exige le déploiement d’un réseau de qualité d’ici 2024. « La 5G est importante pour l’économie, pour la sécurité et pour l’environnement. Le Covid-19 nous a montré que des réseaux de données performants nous permettent de résister aux crises », mentionne la conseillère nationale Isabelle Chevalley. Pour cette ambassadrice du site chance5G.ch, « La cinquième génération de téléphonie mobile permet d’apporter une infrastructure de base centrale pour la durabilité et la protection de l’environnement. » Plus restrictive que ses voisins, la Suisse est à la traîne dans la modernisation de son réseau. Pour le premier opérateur du pays, l’objectif est de respecter le mandat entrepris avec la Confédération : « L’office fédéral de la communication (OFCOM) met en vente des licences pour l’utilisation des fréquences. Nous sommes donc dans une obligation de couverture en matière de télécommunication », renseigne Christian Neuhaus, porte-parole et responsable des affaires publiques de Swisscom. Au-delà de l’acquisition de fréquences, l’importance de la 5G permettrait de soulager les installations actuelles qui arrivent presque à saturation selon les experts : « En milieu urbain, les antennes 3 et 4G atteignent 90% de leurs capacités ». Pour ne rien arranger, les spécialistes observent un doublement de la bande passante tous les 18 mois : « Si nous continuons à ce rythme-là, nous allons rencontrer des saturations de réseaux. Ces situations sont connues à l’étranger, mais le réseau suisse est extrêmement bien développé et permet encore d’assurer le risque de congestion. Même si des signes de saturation se font déjà sentir à certains endroits », souligne Christian Neuhaus. Pour y remédier et éviter ce trop-plein, il est essentiel de construire de nouvelles antennes. « On parle souvent de blocage de la 5G, mais il faut savoir que lorsque l’on s’oppose à l’installation d’une antenne, c’est également le développement des réseaux 3 et 4G qui est bloqué ».
Où en est-on avec les procédures de mise à l’enquête ?
Rembobinons en avril 2019. A cette époque, le Conseil d’Etat vaudois suspend toute délivrance d’autorisation de construire tant que les méthodes de mesures ne sont pas certifiées et contrôlées par l’Institut fédéral de métrologie (METAS). « Plusieurs projets-pilotes ont permis par la suite d’analyser le rayonnement émis des antennes adaptatives conformément aux recommandations de la Confédération », mentionne le communiqué de presse relatif aux résultats de ces essais. L’objectif est de garantir le respect des valeurs limites fixées dans l’Ordonnance fédérale sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI). « Ces tests à taille réelle ont permis de déterminer que les cantons possédaient les outils pour évaluer la conformité des antennes adaptatives », précise Sylvain Rodriguez, directeur de l’environnement industriel et urbain à la Direction générale de l’environnement. Suite à ces résultats, le canton délivre depuis le mois de mai le précieux sésame autorisant la construction d’antennes 5G. « Les projets-pilotes ont également démontré un besoin d’appuyer les communes dans les procédures d’autorisation ». Si la composition des dossiers ne change pas d’une procédure de mise à l’enquête conventionnelle, les aspects techniques et les craintes de certains citoyens peuvent engendrer d’importants retards du côté des communes. « Nous sommes actuellement en train d’élaborer un guide afin d’aider les exécutifs dans leur démarche », nous apprend Sylvain Rodriguez. L’ouvrage, qui se veut très complet en abordant les aspects liés au territoire, est prévu pour cette fin d’année.
Et sur le terrain ?
Pour Christian Neuhaus et ses confrères, la promotion des antennes 5G haut débit nécessite encore un travail promotionnel afin de changer les mœurs : « Il est nécessaire de discuter et de bien expliquer comment fonctionne cette nouvelle technologie. En Suisse, les valeurs limites émises par les antennes 5G sont beaucoup plus restrictives que les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé qui sont appliquées par nos pays voisins », rappelle le porte-parole. Dans notre édition du 16 septembre dernier, nous avons relevé qu’environ 5700 antennes 5G haut débit sont déjà actives dans le pays. Une information publiée par le quotidien
« Der Bund » et relayée par plusieurs groupes d’opposants à la 5G. Pour le bureau de Sylvain Rodriguez, ce chiffre est cohérent. On dénombre 1500 antennes de téléphonie mobile sur le territoire cantonal, un tiers d’entre elles ont été activées avec la fréquence 5G haut débit sans avoir recours à la procédure de mise à l’enquête. « L’activation de la 5G sur les puissances et fréquences déjà autorisées ne nécessitent pas d’autorisations cantonales ou communales », précise le bureau de Sylvain Rodriguez. En effet, tant que les modifications ne touchent pas visuellement les antennes existantes ou leur rayonnement, les opérateurs peuvent adapter ces dernières pour activer la 5G. « Le point clé est de ne pas toucher au rayonnement », souligne le porte-parole de Swisscom.

Les récentes pannes
« Les interruptions du réseau internet rencontrées ces derniers temps n’ont pas de lien avec le réseau mobile. Par contre, le réseau mobile est très important pour assurer une redondance dans ce genre de situation »
Christian Neuhaus, porte-parole et responsable des affaires publiques de Swisscom
Internet terrestre ou en orbite ?
A l’image des satellites dédiés aux GPS, des milliers de Cubesat (petit satellite de moins de 2 kg) orbitent autour de la Terre. Elon Musk, patron de SpaceX, Tesla, PayPal et le fondateur d’Amazon, Jeff Bezos, se disputent l’orbite basse avec leurs constellations respectives Starlink et Kuiper. Les enjeux de ces acteurs sont de fournir l’internet à haut débit depuis l’espace. Pour Swisscom, ces nouveaux distributeurs de données représentent une concurrence supplémentaire. Cependant, un défi de taille reste encore à confirmer pour cette technologie : « Plus nous sommes éloignés d’un émetteur, moins le débit est bon et plus votre appareil émet des rayonnements », informe Christian Neuhaus.
Dernières nouvelles
Jeudi 23 septembre, lors de son assemblée générale, le DTAP a recommandé aux autorités cantonales et communales de ne plus autoriser les modernisations automatiques pour les cas dits « de bagatelle ». L’adaptation des antennes de téléphonie mobile devrait elle aussi être soumises à un permis de construire. Le DTAP recommande la suspension de ces modernisations jusqu’à une clarification avec le Département de l’environnement (DETEC) et les opérateurs de téléphonie mobile d’ici à la fin de l’année.